MAX NEUMANN
11 septembre > 8 novembre 2014
Commissariat d’exposition : Thierry Fahmy
Max Neumann né à Sarrebruck en 1949, est un artiste allemand reconnu internationalement, il est présent dans de nombreuses collections, comme la Neue Nationalgalerie de Berlin, la Fondation Francés. Il vit et travaille à Berlin.
Son oeuvre peuplée de silhouettes noires et de scènes énigmatiques se remplit d’une dimension profonde. Il y a plusieurs strates dans l’oeuvre de Max Neumann, le récit solitaire de personnages sans visage, sans parole, de situations intemporelles. Et il y a la matière sous-jacente, diverses techniques de dessins et peintures appliquées sur de la cire créant une surface épaisse, une nébuleuse de l’inconscient.
« Max Neumann, contrairement à ses contemporains allemands, échappe à l’Histoire. Tout ce qui se passe dans ses compositions se réduit aux dimensions d’un être qui n’est nulle part, insituable et insitué, au-delà et en deçà de l’Histoire. Neumann est né dans ce milieu du XXe siècle où l’homme est désormais sans illusion sur la brute qui dormait en lui. »
Jean-Marie Tasset
Extrait de Le double Je de Max Neumann
« L’obscurité prédomine, les demeures enregistrent la circulation de masses denses. Les hommes sont là, mais il n’est pas possible de distinguer qui que ce soit. Nocturne, anonymat et énigme. Max Neumann pratique un accueil modéré, hybride et transformiste de l’image, à la recherche de signifiés qui sont hors de la portée représentative de la figuration.
A l ‘époque où la peinture figurative rivalisait encore avec l’art abstrait. André Masson concevait la qualité figurative comme une manifestation du mouvement d’instinct, comme une érotique irrésisible de la figuration animée avant tout par le désir. Des désirs fébriles avec une volonté de forme, prêts à être délivrés de l’air de façon épicurienne, face au prétendu quietisme abstrait.
Max Neumann parvient à la figure précisément à travers la pensée abstraite. Il ne s’agit plus de réincarner sur la toile les images analogues qui nous entourent. Il se jette sur un sous-monde intérieur indescriptible, il affronte la caverne sombre de la pensée et il en sauve des images en formation. La valeur de sa peinture consiste à avoir donné un sens réaliste à l’inconsistance, à l’instabilité de l’image qui, elle, se trouve finalement au fond de la pensée. Et à avoir donné à cette sorte de transfiguration continuelle, de changement perpétuel des corps, au désarroi de l’image, une fixation, une immobilité mystérieuse et pleine de quotidien.
Il se meut dans l’intrigue d’un monde en interrogation permanente où l’énergie anthropomorphique est plus forte que tout autre. Cucchi disait que peindre c’était extraire quelque chose de l’obscurité de la terre. Max Neumann acquiescerait probablement, à cause de la comparaison qu’il établit entre la peinture et un puits obscur, la peinture et la notion de repli et d’attention aux origines des cycles vitaux, à cette idée de déterrer afin d’évoquer des mémoires inconnues. Les œuvres de l’artiste allemand comportent toujours une atmosphère de génèse à laquelle il ne peut pas renoncer, une volonté d’être dans les choses qui lui permet de passer outre à leur unicité, à leur logique formative. Tout devient finalement un problème de visions, de trous de la pensée symbolisés par ce recours constant à l’œil en tant que seul et incontournable élément qui définit des visages. En fait, il tire profit d’une iconographie itinérante toujours bercée par le vide, par un vide actif compris comme fond inquiétant doté d’une vie propre, une vie qui maintes fois se confond avec l’architecture propre des corps.
C’est d’ailleurs dans ce sens que Roland H. Wiegenstein l’avait interpreté : «toutes ses inventions figuratives sont utilisées de façon instrumentale pour inspecter la surface ». Il y a là, à n’en pas douter, une fantasmagorie ambiante qui parcourt l’air et qui laisse en suspens les correspondances iconographiques qui s’y font jour. La superficie, dans la peinture et dans les dessins de Max Neumann, se trouve être la grande fosse de la vie, une énorme membrane d’ énergie par où transitent des esprits, des êtres potentiels, et par la même, indéfinis. »
Teresa Blanch,
Le lieu comme invitation, 1990